Si j'avais les mots
Je crois que ma plus grande difficulté face à la maladie mentale, c’est de trouver les mots.
Trouver les mots pour décrire, expliquer, retranscrire.
La dépression c’est tellement d’émotions et en même temps tant de fatigue que je n’ai souvent pas la bonne manière de l’expliquer.
Par exemple, j’ai souvent dit à mon ancienne psy “Mais à quoi ça sert tout ça?”, sans jamais réussir à expliciter ma pensée.
J’ai depuis de nombreuses année des difficultés à trouver mes mots. Est-ce du à la dépression, aux médicaments ou à tout autre chose? Je n’en ai aucune idée. Mais cela complique grandement les choses quand il faut parler de ce que je ressens.
J’ai des difficultés à l’expliquer à autrui, à ceulleux qui ne connaissent pas la dépression. Mais j’ai aussi du mal à trouver les mots chez la psy.
Un simple “Je suis fatiguée” peut renfermer tant de choses, tant de mal être, tant de degrés de fatigue.
Et puis il y a aussi l’envie de disparaitre. Cette tendance à penser à la mort tout en en ayant peur.
Je n’ai pas à proprement parler envie de mourir. J’ai surtout envie de disparaitre, de me reposer, de ne plus avoir mal à la tête et au corps, que mon cerveau cesse de tourner en boucle, que l’envie de pleurer ne soit pas persistante, que tout ce que je vis ne soit pas synonyme de questionnement, de ne plus souffrir du manque d’amour, de cette impression de n’être importante pour personne, de ne plus subir la solitude comme une preuve que je n’ai pas de valeur, de ne plus souffrir des effets secondaires des antidépresseurs, de ne plus avoir besoin d’anxiolytiques pour dormir, de ne plus avoir besoin de suivre une thérapie, de ne plus autant m’écouter, de ne plus entendre la douleur. Bref, de ne plus souffrir d’une maladie mentale.
Je pense souvent à toutes ces journées qu’il faut occuper, auxquelles il faut survivre. Je n’ai pas envie de mourir mais je n’ai pas envie de vivre longtemps. Car vivre est souvent une douleur, une charge énorme à porter pour moi. Chaque journée est une sorte d’épreuve de survie.
Mais comment trouver les mots pour le faire comprendre à quelqu’un qui n’a jamais ressenti cela?
Comment expliquer l’anxiété, les pensées persistantes, le mal de ventre, la douleur d’être éveillée, l’envie de dormir pour que le temps passe plus vite?
Comment expliquer que vivre est une douleur mentale?
Comment expliquer la maladie mentale en fait?
Je pourrais faire un laïus sur la chimie du cerveau, mais je crois que même ça ne permet pas de faire comprendre comment ça se passe vraiment quand on le vit.
Je ne crois pas qu’on puisse imaginer la douleur et le vide de la dépression sans le vivre.
Et pourtant j’aimerais tant parvenir à m’expliquer, à détricoter, à retranscrire.
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